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Refus de soins et provocation du docteur dans le cra

Témoignage de A. décembre 2024

Ici, un témoignage de A. qui nous raconte les conditions de santé au CRA du Canet et surtout le refus des soins médicaux nécessaires et le racisme de l’équipe médicale.
A. se retrouve pour la seconde fois dans un CRA après un aller retour CRA-prison pour avoir refusé lors de sa première rétention d’être expulsé vers l’Algérie, qui n’est pas son pays.

Témoignage de décembre 2024

« A : Je suis arrivé ici le 14 octobre 2024 et là ça fait 66 jours que je suis là.

Question : C’est comment en ce moment dans le dépôt surtout pour toi parce que tu nous as dis que tu avais un problème de santé ?

A. : J’ai un problème de santé depuis longtemps. Depuis que je suis ici, 4 jours après, le 18 octobre ils m’ont ramené à l’hôpital parce que mon épaule se déboîtait à chaque fois en dormant. Même si je touche rien, en dormant. Là ça fait 60 jours ou presque que je suis avec l’attelle, j’ai vu le chirurgien et il m’a dit que je devais faire une opération obligatoire. Il m’a donné les papiers pour le kiné et un jour, je suis parti voir le médecin ici (au CRA) et il s’est pris la tête contre moi. Il voulait que je m’énerve. Il me cherchait, il voulait que je craque mais moi je ne lui ai pas donné cette chance. J’étais calme, j’étais normal. Même pour prendre un rendez-vous avec le chirurgien pour l’opération il m’a poussé et il m’a dit « Va voir avec un de mes collègues ». Je ne lui avais rien dit de mal, il y avait même un policier à coté de moi mais je sais qu’il ne va pas témoigner. Il m’a dit que je lui aurais manqué de respect alors que je ne lui ai rien dit de mal, aucune parole. Il m’a dit « Vous pensez que je ne fait pas mon travail ? » et moi je lui ai dit de faire son travail « ni plus ni moins, je vous demande que ça. ». Puis il m’a crié dessus, il s’est énervé, il s’est levé et m’a poussé avec son corps comme ça (corps contre corps) pour me sortir du bureau. Et après il m’a dit d’aller voir un de ces collègues car il ne prendra pas le rendez-vous.

Ça c’est un médecin ? C’est pas normal. Un médecin normalement il est là pour soigner les gens, pour aider les gens. C’est pas comme ça la médecine.

Ils m’ont appelé à midi à l’heure de manger et je suis parti le voir (le docteur). «Bonjour bonjour». Je lui dis que là, on doit parler de mon épaule parce que je n’en peux plus, je dors avec l’attelle tout le temps et que ça fait presque 2 mois que je suis avec ça. J’arrive plus à le supporter, je ne peux pas laisser ma main libre. J’ai donné les papiers que le chirurgien m’avait donné pour le kiné. Le docteur (du CRA) me répond direct qu’ici il n’y a pas de kiné donc je lui demande un certificat (qui justifie qu’il n’y pas l’assistance de soin nécessaire) pour que je puisse l’envoyer à l’avocate et à la juge, pour qu’elle me libère et que je commence à faire les séances de kiné. Le docteur me dit « combien de certificat je vous donne (provocation) » alors que c’est la première fois que je lui demande un certificat. Le chirurgien il m’a dit que je devais faire une opération obligatoire. Et quand je lui ai demandé ça (un certificat), il m’a dit que comme ma rétention se terminait le 14 janvier, que je la ferai après (l’opération). Mais il sait qu’ils vont me ramener en Tunisie, c’est pour ça il ne veut pas le faire. Pour que je ne sorte pas. Et là ça fait 60 jours que je suis avec l’attelle . Je dors avec, je l’enlève que quand je vais faire la douche et je fais attention qu’elle ne se déboîte pas.

Même la juge elle m’a demandé que le docteur me donne un certificat du centre de rétention. Et lui il ne veut pas me le passer, il veut pas. Je sais pas, moi je ne lui ai rien fait de mal, je l’ai vu deux fois et je l’ai toujours respecté. Je lui ai parlé bien et comme il était énervé contre quelqu’un d’autre il a mis ses nerfs sur moi. J’ai vu les infirmières hier, je leur ai parlé et leur ai demandé pour avoir un rendez-vous avec un autre docteur parce que je crois qu’il y a un ou deux docteurs, trois demi journées par semaine. C’est pas tous les jours il y a le docteur ici, juste trois demi journées. Elles m’ont dit qu’elles allaient me prendre un autre rendez-vous, mais pas avec le même car lui il ne veux pas me voir. La semaine dernière j’étais à l’hôpital Nord pour mon épaule qui s’était encore déboîtée, et il (le docteur) ne m’a pas appelé, il ne m’a rien dit et quand j’ai parlé avec l’infirmerie elles m’ont dit qu’il ne voulait pas me voir. Que l’on a déjà parlé et qu’il n’a rien à me dire de plus. Ils ne m’ont même pas donné de médicaments rien du tout. «Va voir avec mon collègue» il m’a dit. Que le rendez-vous avec le chirurgien pour l’opération il ne me le prendrait même pas. Il me l’a dit direct, comme-ça, de face à face.

Les infirmières ça se voit dans leur yeux le racisme, je le vois. Elles rigolent devant et après … J’ai 42 ans je vois tout. Il y en a qui sont bien je mens pas. Il y en a pas trop, pas beaucoup (qui ne sont pas racistes). Mais il y en a ça se voit de loin qu’elles ne veulent pas travailler ici avec les étrangers. Alors pourquoi ils viennent ? Tu le vois. C’est pas que avec les infirmières, il y a des policiers ça se voit aussi.

Ils donnent juste les cachets pour les cachetonnés. Les cachets pour que les gens deviennent fous, c’est tout il y a que ça. Mais pour te soigner, vraiment te soigner, non ! Je parle de mon cas, il me faut une opération et beaucoup de choses et ils s’en foutent.
J’en ai vu un, son pied entier dans le plâtre et il est là, c’est les policiers qui poussent son chariot tous les jours. Il fait quoi ici ? Il arrive pas à se lever. Il fait quoi ici ? On est des êtres humains normalement, il est malade. Il y a des diabétiques et tout mais ils font rien. Mais pour donner les cachetons pour faire devenir fous les gens, là oui ils donnent. Ils viennent, distribuent les cachetons et partent. Mais pour prendre une rendez-vous ou pour te soigner, non !

Moi je suis là depuis 66 jours, j’attends mais il y a des choses ici. On ne dort pas la nuit, il y a des cris, il y a de tout. J’en peux plus, je suis fatigué avec la douleur que j’ai dans mon épaule, avec les problèmes pour mes enfants, je ne vois pas mes enfants. Je peux plus moi ! Je n’arrive plus à tenir. Et lui (le docteur) il cherche à ce que je craque, mais je ne vais pas craquer contre eux.
Il y a un vieux de 72 ans il est diabétique, il fait quoi ici ? 72 ans ! C’est un grand-père. Il est en France depuis 42 ans, il travaille, il est déclaré et tout. On est pas des êtres humains pour eux c’est tout. Ils nous voient comme .. je sais pas .. ils s’en foutent. Pour sortir il ne fait rien (le docteur), pour te soigner à l’extérieur il fait rien, si tu es malade ils s’en foutent de ça. Mais pour te donner les cachetons, ça ils viennent tous les matins, 9h hop chacun il a son nom, sa petite enveloppe et chacun à sa dose. Tous les jours ça, même le samedi et le dimanche c’est les policiers qui distribuent. J’avais mal aux dents 3 semaines. Ils me voyaient dans les caméras, toute la nuit je marchais dans le couloir pour ne pas déranger mes co-détenus. Et ils s’en foutent, ils s’en foutent. Le doliprane ils m’en ont donné une fois et ils m’ont dit qu’ils vont me ramener chez le dentiste mais peut-être je ne suis pas là.

Pour eux on est pas des êtres humains, moi je le vois. J’ai 42 ans, je ne suis pas né hier. Les gens ne voient pas parce qu’ils sont cachetonnés, parce que même les médicaments ils le mettent dans le manger. C’est pour ça je ne mange presque pas. Je prend juste le beurre, la confiture ou du fromage, le pain ou le sucre. Je sais qu’il y a des trucs dans le manger.

Moi je veux rentrer en Tunisie, la Tunisie c’est mon pays mais je veux prendre mon fils avec moi. Après moi il y a qui ? Mon fils a perdu sa mère, il va perdre son père et il va perdre le lien avec son petit frère. C’est un gamin de 8 ans. Si ils ont un cœur normalement ils le voient ça. Pour le petit, pour le bien de ce garçon, il a 8 ans. Mais ils s’en foutent. J’ai ramené tout, le certificat de décès de la mère de mon fils, j’ai tout ramené. Mes enfants sont français. Je sais pas, mais ils veulent faire de moi un monstre, ils veulent que je deviennent un monstre.
La juge elle peut être loin de son fils une semaine ? Je pense pas. Mais pour nous les étrangers, oui. On est des étrangers on est pas des êtres humains. Mon grand-père c’est un ancien combattant français, 1942. Il a laissé ses yeux ici, il a perdu ses yeux ici. Il a vécu toute sa vie aveugle, pour la France. Et voilà maintenant pour son petit-fils ce qu’ils font.


Un mort dans la révolte du 30 Juin au premier Juillet au CRA de Marseille

Dans la nuit du 30 Juin une révolte a éclaté au centre de rétention du Canet à Marseille. Un incendie a été déclenché, occasionnant des blessé.es, et de la répression : le lendemain plusieurs personnes ont été transférées au cra de nîmes ou mise en garde à vue dans des commisériats de marseille. Une personne est partie à l’hopital dans un état particulièrement grave. Hier on a appris sa mort

T.W. : Ces témoignages parlent de cas de suicides

Voici deux témoignages issus d’appels de personnes encore à l’intérieur :

Témoignage cra marseille 02/07/2023 :
Je disais la situation dedans, les toilettes sont très sales, la nourriture est moisie tu peux même pas donner a un chien, ya rien, ils [la paf] insultent les gens et tout et provoquent les gens il y a deux groupes.
yen a un ils insultent et sont tres raciste, tu demande un sachet de sucre ils te donnent pas, rien. [A propos du cachot] Non pour le moment ya pas, moi la semaine passée, ca fait dix jours j’ai demandé a voir un medecin. Je vais meme pas a l’hopital, pas de medicaments.

C’est pour ces conditions (le feu)
Ils ont voulu eteindre vers 1h du matin ca a commencé a minuit jusqu a
3 heures du matin.
Tout le monde se sent pas bien on a perdu quelqu un qui est bien et tout. Dans une situation comme ça, de la misère et tout et en plus de ça tu perds des personnes, ça se passe pas bien. Tout le monde a le moral nul.
Ya des gens qui font des tentatives de suicide ici, c’est pas le premier celui la ya quelqu’un avant lui il a passé trois jours a l’hopital ils l’ont ramene ici. Tout le monde veut se suicider plutôt que d’aller en prison parce que tu passes 1an en prison et 3 mois ici.

Témoignage cra marseille 02/07/2023
Ils l’ont frappé, il a même un œil au beurre noir et tout dans l’etage ou yavait l’emeute. Quand les policiers ils sont arrivés, lui il était calme tranquille et directement ils l’ont frappé je sais meme pas pourquoi. Il a tapé la tete contre les murs son nez il est tordu et il a les deux yeux au beurre noir. Là, il est passé en jugement ils lui ont mis 22 jours. Là il est pas en isolement il est à mon etage, l’etage des gens tranquilles. Là ça va mieux c’etait avant-hier quand ça s’est passé.
Quand ils sont arrivés les casques bleus, ils l’ont plaqué à lui alors qu’il avait rien a voir, ils ont dit yavait les cameras et tout mais sinon il aurait pris soit de la prison soit transferé comme ils ont transfere d’autres.
Yen a plusieurs qu’ils ont amenés en prison par rapport a l’emeute.
Lui qui est mort, yen a deux en fait. Yen a un son cœur il s’est arreté et
après ils lui ont fait le massage cardiaque a l’hopital, ils l’ont reveillé avec les machines et nous on a entendu ya un mort en plus mais on est pas surs en fait. Il est parti d’ici mort on dirait mort mort.
Même les policiers ils nous ont dit il est mort et je crois sur la route pour l’hopital ils l’ont reveillé dans l’ambulance. Même mon collegue qui était a l’etage avec lui il m’a dit franchement je sais pas on croit que c’est une overdose. Vous voyez le jour ou il y a eu le feu ils ont mis tout le monde dans un etage et son collegue quand il sest reveillé il a vu qu’il bougeait plus il a fait quoi il l’a sorti de la cellule il a appelé ils ont commencé a paniquer ils ont appelé la police et les pompiers sont venus le chercher
Et lui qui est avec moi ils l’ont plaqué contre le sol contre le mur en fait quand ils l’ont plaqué ils ont plaqué le visage contre la vitre ils lui ont mis un coup de coude ils sont rentrés directement ils sont allé vers lui alors que c’est un de ceux qui a rien fait.
Quand les casques bleus sont arrivés ca a mis tout le monde a genoux ça a mis des claques a genoux dans la promenade on dirait une petite cage a poule ils ont sorti a genoux lui qui passe ça l’eclate lui qui dit c’est pas moi ou ce qu’il sest passé c’était paf direct. Surtout dans notre etage parce que c’est pas dans notre etage que ça s’est passé pendant qu’ils etaient a genoux dans les promenades l’étage d’en bas ceux qui ont mis le feu et tout ça nous on était en train d’asphyxier parceque on est au 1er etage. Et l’etage d’en dessous ça cramait. C’est monté par les aerations les placards de l’electricité ya eu 2/3 explosions ils nous ont dit de rester en promenade et apres qu’ils ont maitrisé ceux d’en bas ils sont mont’s nous voir a nous. Moi j’ai le stage de premier secours, yen avait un ils l’ont pas soigné il a failli mourir par rapport a la fumée. Je lui ai fait le massage cardiaque sur place ça l’a soulagé et apres le lendemain, hier, il est parti a l’infirmerie ils lui ont donné un cachet ils lui ont donné la ventoline et voila ils lui ont dit ca va passer parce que sa voix est devenue bizarre et il respirait mal. Yavait les pompiers a l’infirmerie quand il y est allé.
Ya plusieurs personnes qui sont allées a l’hopital. Moi jvous ai raconté par rapport a la personne qui est en etat grave 1 ou 2 ils ont amené a l’hopital.

Témoignage: Expulsion massive vers l’Algérie via avion privé et conditions dans le CRA

Enfermé dans le Centre de Rétention de Marseille depuis un mois, Y. a été expulsé vers l’Algérie et veut témoigner de son expulsion. 

Ces dernières semaines, les expulsions des personnes vers l’Algérie étaient suspendues à cause des « tensions diplomatiques » entre les deux États. Elles ont repris avec force la semaine dernière.

Y., une personne qui a été expulsée, a voulu témoigner de la reprise des expulsions.  Il nous a dit que les matons étaient vraiment « très sales » avec lui. Ils sont venus dans la nuit et l’ont menacé avec du scotch. Selon Y. c’était « soit le bled, soit la prison ». Il n’a pas pu prendre ses affaires, ils l’ont embarqué sans rien vers un pays qu’il ne connaît pas (il a grandi en France). 

Lui et une quinzaine de personnes (venues d’autre CRA aussi) ont été emmenées à l’aéroport où un avion sur une piste « cachée » les attendait. Y. parle d’une petit avion, conduit par un condé, avec 3 ou 4 camionettes à coté. 

Nous avons déjà parlé d’un terminal « caché » à l’aéroport de Marignane, un terminal que n’emprunte jamais le touriste lambda, tout au bout d’une route qui longe l’étang de Berre, coincée entre l’étang et les grillages de l’aéroport, à coté d’un entrepôt DHL. A l’abri des regards des touristes, des voyageurs privilègiés avec les « bons papiers » et en empêchant tout appel à l’aide, l’État français déporte en masse des personnes dans des petits avions, dans des situations terribles, schotchées, menottées, attachées…

Nous avons aussi reçu une vidéo enregistrée quelques jours avant cette expulsion de masse. Les personnes qui l’ont faite tiennent à montrer à l’extérieur les conditions dégueulasses et dégradantes dans lesquelles elles se trouvent. Ce qu’on voit dans cette vidéo, ne sont pas des conditions exceptionnelles, mais le quotidien dans le CRA de Marseille (et dans toutes les autres CRA).

À ça nous devons bien sûr ajouter les violences des keufs racistes de toutes sortes comme tabassages, fouilles, insultes….  et autres situations dégradantes : bouffe immangeable et refus de soigner même les situations plus graves.

Force à vous tous et à tous les prisonnier.e.s et à leurs proches !

Feu aux CRA !

Article sur Twin jet : 

La compagnie aérienne Twin-jet et l’état français expulsent chaque vendredi vers la Tunisie

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Prise de parole anti-carcérale sur Sainte-Soline

Le choix de la répression par la violence à Sainte-Soline est ici totalement assumé par le gouvernement, il lui suffit pour cela de prétendre dans les médias que c’était le rassemblement qui était violent. On se souvient que Darmanin avait déjà parlé d » »écoterrorisme » lors du rassemblement contre les mégabassines en novembre dernier.

Ce retournement du discours pour légitimer la violence est systématiquement mobilisé par l’État quand il a besoin de se justifier. A chaque fois qu’un keuf tue une personne, l’État utilise sans trop de problèmes le racisme, l’islamophobie, le soi-disant « ensauvagement » des quartiers, une dangerosité fantasmée de la personne tuée, comme si elle avait mérité de mourir. 

Dans la plupart des cas de violences d’État, celles dont on parle le moins, l’État n’a même plus besoin de se justifier. La violence est par principe légitime à tout moment contre des gens que l’on peut présenter comme des monstres. Lorsqu’un prisonnier ou une personne déjà exclue de la société est tuée par des matons ou des keufs, l’État ne mobilise même plus ce discours.

Ces violences sont permanentes et quotidiennes contre les personnes racisées, contre les personnes sans-papiers, contre les prisonnières et les prisonniers. Il n’existe pas un seul centre de rétention, pas une seule prison où les keufs ou les matons ne sont pas violents, au quotidien. Des dépôts de nourriture interdits en cette période de ramadan au centre de rétention de Marseille, jusqu’aux tabassages, fouilles à nu, transferts disciplinaires et mise au mitard comme c’est le cas aux Baumettes fin janvier, les violences d’État sont, ne l’oublions pas, permanentes en prison.

Comme le montre le week-end à Sainte-Soline, un manque de soins organisé par l’État peut mettre quiconque en danger de mort. En prison, en centre de rétention, les soins décents n’existent pas et n’ont jamais existé. Il ne s’agit pas d’une absence de soins, mais d’un refus de soigner, un choix volontaire de laisser mourir. Le refus de soigner est une violence d’État. Et en prison, la violence est quotidienne. Qu’est-ce qu’un quartier d’isolement si ce n’est de la torture blanche ? Que dire des conditions de détention en régime 41 bis en Italie, dans lesquelles l’État italien est en train de laisser mourir Alfredo Cospito (en grève de la faim depuis plus de 5 mois), sans parler de violence légale, institutionnelle ?

La police et la Justice fonctionnent ensemble. Le taf des keufs consiste à tuer, à faire peur, ou à arrêter des gens pour les mettre en prison. Les tribunaux consistent à faire peur à tout le monde dehors, à condamner les gens à des peines de prison, parfois à des peines jusqu’à la mort. En ce moment, le gouvernement demande aux keufs d’intensifier la violence et les arrestations dans les manifestations, pour faire peur et que la mobilisation se réduise. 

L’État élargit sa répression au mouvement social en ce moment, mais cette violence et ces arrestations ne sont pas nouvelles, elles touchent une population qui est déjà massivement enfermée et qui est appelée à l’être encore plus (comme le prouvent les constructions de nouvelles prisons, par exemple en ce moment à Marseille avec les Baumettes 3, au nord de Nîmes, près d’Avignon à Entraigues-sur-la-Sorgue, ou dans le Var au Muy).

L’État tente de plus en plus de légitimer la répression de tout ce qui ne représenterait pas les « valeurs de la République », pour ne pas dire les valeurs de l’État. La loi séparatisme de 2021 a engagé un processus de dissolutions de groupes étiquetés anti-républicains les uns après les autres : le Collectif contre l’islamophobie en France (CCIF), la Coordination contre le racisme et l’islamophobie en France (CRI), il a essayé aussi contre le Groupe antifasciste Lyon et environs (GALE), Nantes révoltée ou encore le Collectif Palestine Vaincra (CPV). L’annonce de la dissolution des « Soulèvements de la terre » par Darmanin mardi fait partie de ce point de bascule. D’ailleurs, c’est ce même prétexte du respect des « valeurs de la République » que Darmanin brandit pour justifier l’enfermement massif en CRA et l’expulsion des personnes sans-papiers (c’est déjà le cas et la loi Darmanin à venir ne fera que le renforcer), ce même prétexte aussi qui permet à n’importe quelle préfecture de couper les subventions à une association qui ne lui plaît pas.

Sainte-Soline illustre le durcissement sécuritaire actuellement en cours, qui repose fondamentalement sur la violence : les violences policières, et avec elles les violences pénitentiaires. On sait que l’on n’a rien à attendre de la police ni de la Justice, si ce n’est la violence, la mort, la peur, des peines de prison et tout un tas de galères.

Lu au rassemblement contre les violences policières, jeudi 30 mars 2023 devant la préfecture de Marseille

« On reste pas dans un endroit où il y a toutes les maladies » : Grève de la faim des prisonniers du CRA de Marseille

La situation sanitaire est catastrophique dans le Centre de Rétention du Canet à Marseille. Entre la tuberculose et le covid, le manque de clim et d’eau fraîche, les prisonniers sont à bout et les autorités s’en foutent. Les prisonniers du peigne 1C et OC s’organisent et font la grève de la faim avec comme revendication leur libération. A : « C’est notre objectif. On reste pas dans un endroit où il y a toutes les maladies. ».

Voici deux témoignages de prisonniers, A et R, d’un des deux bâtiments en grève :

Témoignage de R :

On a un cas de covid, il a 40 de fièvre. Et il vomit, il s’arrête pas de vomir. Ça fait trois-quatre jours qu’on les appelle. Il y en a un autre qu’ils ont envoyé à l’hôpital. Ils l’ont envoyé à l’hôpital parce qu’il avait des symptômes je sais pas de quoi. Ils veulent pas nous dire. Ce matin encore il y en avait un qui avait le covid, ils l’ont fait sortir ce matin, je sais pas ils l’ont envoyé où.

Plus la tuberculose, on est confinés, ils nous confinent encore. Ils veulent nous enlever les parloirs. Tout le monde est malade mais ils veulent pas nous faire sortir.

Ils enlèvent les parloirs du bâtiment 1C ?

Ils veulent nous les enlever oui, mais nous on a dit non.

La clim, ça fait depuis une semaine qu’on leur dit « mettez-là nous ». En bas, ils ont la clim, en haut, ils ont la clim, nous, rien. Ça fait une semaine. Ils ont dit « vous avez jusqu’à mardi ». Oui mais mardi c’est loin. On va passer la journée d’hier, d’aujourd’hui, de demain… On leur a dit « donnez-nous au moins de l’eau fraîche ! ».

Et il y en a pas ?

Non, elle est tellement chaude qu’on peut pas la boire. Alors on a fait le compte, quatorze-quinze bouteilles, c’est une quantité. Mais dans la soirée, dans la nuit, je bois moi aussi, j’ai soif ! Eh beh on a pas d’eau. Ça veut dire démerdez-vous.

On a des cas de tuberculose. Ils nous ont dit qu’on est tous indemnes mais y en a qui sont malades, et on sait même pas ce qu’ils ont !

Hier, si on avait pas appelé les pompiers… Hier, on a appelé les pompiers, et les pompiers ils ont pas voulu venir. Ils ont dit « Ah non, si vous êtes en Centre de Rétention, appelez la police. ». Mais appelez-les-vous ! Parce que nous on les appelle et ils veulent pas nous répondre. Ils les ont appelés et ils sont montés. Après ils ont vu que c’était sérieux. Il y en a un qu’ils ont envoyé à l’hôpital, un qu’ils ont laissé. Et là, il est malade, il en peut plus. Il est allongé dans son lit, il est en train de trembler, il arrive pas à marcher. Il a même pas manger ce midi ! Il a des courbatures. Je sais pas quoi faire…Il a pas de goût… C’est le corona ! Il a mal de partout.

Vous savez s’il y a des médecins qui sont venus ?

C’est les pompiers. Quand on a appelé les pompiers, ils ont appelé le Centre de Rétention, ils leurs ont dit de monté. Ils sont montés, et ils ont constaté que c’était vrai. Il y en a un là allongé par terre et un autre là-bas. Ils ont contrôlé. Celui d’hier ils l’ont mis à l’hôpital, et celui de ce matin ils l’ont convoqué. On sait même pas si ils l’ont fait sortir, ils l’ont confiné ou… On sait rien. On attend. La tuberculose, le mec il est sorti, ils ont pas nettoyé la chambre. Ça fait que le mec qui est dans la chambre, on pense qu’il a attrapé sa maladie à lui. Après ils disent « Oui, mais on était occupés. On avait d’autres choses à faire. ».

Et la clim, ce matin on est sorti chercher des traitements, et eux ils ont la clim ! Et nous on a pas la clim. C’est un truc bizarre ça. On a dit « Comment ça vous avez la clim ? », « Nan mais c’est une clim à part… ». Mais s’il y a la clim, il y a la clim pour tout le monde ! Il fait tellement chaud qu’on sait même plus quoi faire.

C’est des menteurs. J’ai jamais vu une justice aussi menteuse qu’eux ! Là, il y a même pas de justice. C’est du mensonge sur mensonge sur mensonge… Ils acceptent le mensonge. C’est un truc de fou, j’ai jamais vu ça. On existe pas, ils calculent même pas un seul. C’est pas une injustice ça ?

Quand je vais sortir on va régler cette histoire, parce que mon histoire elle est vraiment à dormir debout, vraiment à dormir debout.

Il y a 4 mois en arrière j’étais en bas, on était bien, et là j’arrive : le corona, la tuberculose, la syphilis… Il a tellement de maladie qu’on sait même plus quoi. On se croirait dans l’ancien temps, le temps d’avant, de la peste, le choléra. Ils servent à rien, ils savent même pas quels symptômes on a, quelles maladies on a.

Qu’est-ce que j’ai fait pour être là ? J’ai fait ma peine, j’ai payé ma dette. Pourquoi je suis là ? Parce que j’ai refusé l’avion pour aller en Algérie ? Ça fait 50 ans que je suis en France.

Ici, chaque jour il y en a un qui tombe.

Témoignage de A :

Comme il t’a dit mon collègue, c’est la catastrophe là. Ils ont pas désinfecté la chambre, et chaque jour il y en a un qui tombe. Ils nous ont fait le test pour la tuberculose, et ils ont rien trouvé mais chaque jour, il y en a un qui tombe. Je sais pas, je comprends pas. Hier, il y en avait deux déjà.

Il n’y a pas de test positif c’est ça ?

C’est ça que je te dis oui. Après je sais pas, peut-être que ça sort pas directement sur le scanner ou sur le test qu’ils nous ont fait.

Et vous savez même pas si c’est le Covid ou la tuberculose ?

On sait même pas. Hier, on a testé la température, on a trouvé 40° ! Le pompier il a dit « il y a rien il y a rien ». Après le lendemain ils l’ont convoqué, ils ont pris ses affaires. Je sais pas il est où exactement. Même son numéro est éteint.

Vous êtes en contact avec les autres bâtiments ?

Oui on est en contact mais je pense qu’il y a rien. Il y a que dans notre bloc, le 1C.

Là on est confinés encore, on sait pas c’est quoi exactement. Mon collègue, il a un appel à la loi normalement à Aix, et là ils sont entrain de le juger par téléphone.

Quand tu dis « confinés » ça veut dire que les jugements sont à distance ?

Par téléphone oui.

C’est critique là la situation. C’est pas normal. Je suis inquiet un peu. Je vous ai raconté qu’est-ce qu’on vit. Vous imaginez même pas. On est dans une cage, vraiment une cage avec des grilles, des barbelés.

Soutien à tou.te.s les enfermées, à bas les CRA, liberté pour tou.te.s

Marseille anti-CRA
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