TEMOIGNAGE DE SOFIANE

Enfermé puis expulsé vers l’algérie

(Ce témoignage est retranscrit tel qu’il a été entendu, sans modifier les syntaxes ambigues afin de ne pas déformer ce qui a voulu être dit quitte à laisser une marge interprétative)

J’été en centre de rétention en 2021, le 13 septembre et ma carte de séjour été en cours de validité. Je suis sorti le 13 décembre 2021 et ils m’ont donné assignation à résidence pendant 4 mois. J’ai signé au commissariat de Noaille à Marseille, ensuite j’ai terminé les 4 mois et ils m’ont dit que je devait signer encore 6 mois. J’ai dit (et il est bien reporté sur le procès verbal) je veux une preuve au niveau du procureur ou bien du juge comme quoi je vais continuer à signer. Le 17 juin 2022 ils m’ont encore fait rentrer au centre de rétention et je suis resté 75 jours. Je suis sorti avec une assignation résidence à Aix En Provence. J’ai signé du 2 au 10 septembre et ils m’ont attrapé au CRA quand je suis parti pour signer. Ils m’ont mis dans une salle seul et ils m’ont dit demain tu as un bateau à prendre. 

Ils m’ont fait un coup et je n’ai rien compris sur cette histoire. Je n’ai pas compris pourquoi ils veulent pas me faire le renouvellement de la carte de séjour, pourquoi la Préfecture m’as expulsé et pourquoi ils m’ont pris sur un bateau quand sur le papier qu’ils m’ont donné il y avait bien écrit par avion.

J’ai passé 10 ans en France, j’ai toujours travaillé en CDI même.

Maintenant, je suis en train de m’exprimer sur les réseau sociaux. Beaucoup des gens trouvent cette histoire bizarre, j’ai travaillé, j’ai cotisé. Une personne qu’est depuis 13 ans sur le territoire, tout d’une coupe, on peut l’expulser de son pays? En plus je n’ai pas commis de crimes..c’est ça qui m’a étonné. 

Je veux savoir pourquoi ils m’ont expulsé? Je veux savoir la cause, et j’ai aussi demandé au Juge quand il était le moment. Ici, c’est pas facile de trouver un travail pour avoir un visa. Je ne peux pas contacter un avocat car ils m’ont fait tout perdre. Tous mes droit sont bloqués, comme le chômage, auxquels j’avais droit.

Rentrée contre les Centres de Rétention Administrative !

C’est la rentrée du collectif contre les Centres de Rétention Administrative de Marseille !

L’antiCRA Marseille milite contre les frontières et toutes les formes d’enfermement.

Nous essayons de créer des liens avec les personnes enfermées au CRA de Marseille (et parfois de Nîmes, Sète, Nice). L’idée est de faire sortir la parole des prisonnièr.es et de dénoncer l’enfermement et les conditions carcérales. Mais aussi de pointer le système répressif tout entier, CRA, prison, frontières, et les entreprises collabos qui s’enrichissent grâce à lui.

On se retrouve dimanche 2 octobre à partir de 16h à la Dar, pour une série d’échanges sur les nouvelles du/des CRA et les luttes à l’intérieur.

Suite à ça, on mangera ensemble un repas à prix libre préparé par les cuisinières de la cité des flamants, The Noble kitchen.

On sera aussi là pour répondre à vos questions si vous voulez nous rejoindre !

A bas les CRA, et toutes les prisons !

PS : Un repas de soutien est aussi organisé par Parastoo le dimanche 2 octobre – à partir de midi à la Casa Consolat – après le décès de Richie, victime d’un accident du travail en région parisienne le 15 juillet 2022. Richie est arrivé à Marseille à l’été 2018 depuis le Nigeria et a consacré beaucoup de temps et d’énergie à tisser des liens pour aider d’autres personnes de la communauté nigériane queer à s’installer à Marseille. Les violences sexistes, lesbophobes et transphobes ont jalonné son parcours d’exil.

Video témoignage : cas de covid et tuberculose dans le CRA du Canet à Marseille 

Alors que l’Etat raciste construit de plus en plus de Centres de Rétention, les prisonnier.e.s, elleux, sont négligé.e.s, oublié.e.s, méprisé.e.s.

Depuis plusieurs semaines, il y a de nombreux cas de covid et de tuberculose dans le CRA du Canet à Marseille. Entre l’angoisse de tomber malade à tout moment car rien n’est fait pour l’empêcher, et la suppression des parloirs avec les proches, les enfermé.e.s n’en peuvent plus. 

Iels lancent alors une grève de la faim qui dure trois jours. 

Lien vers deux autres témoignages écrits

Liberté pour tous.te.s les enfermé.e.s

marseille anticra

« On reste pas dans un endroit où il y a toutes les maladies » : Grève de la faim des prisonniers du CRA de Marseille

La situation sanitaire est catastrophique dans le Centre de Rétention du Canet à Marseille. Entre la tuberculose et le covid, le manque de clim et d’eau fraîche, les prisonniers sont à bout et les autorités s’en foutent. Les prisonniers du peigne 1C et OC s’organisent et font la grève de la faim avec comme revendication leur libération. A : « C’est notre objectif. On reste pas dans un endroit où il y a toutes les maladies. ».

Voici deux témoignages de prisonniers, A et R, d’un des deux bâtiments en grève :

Témoignage de R :

On a un cas de covid, il a 40 de fièvre. Et il vomit, il s’arrête pas de vomir. Ça fait trois-quatre jours qu’on les appelle. Il y en a un autre qu’ils ont envoyé à l’hôpital. Ils l’ont envoyé à l’hôpital parce qu’il avait des symptômes je sais pas de quoi. Ils veulent pas nous dire. Ce matin encore il y en avait un qui avait le covid, ils l’ont fait sortir ce matin, je sais pas ils l’ont envoyé où.

Plus la tuberculose, on est confinés, ils nous confinent encore. Ils veulent nous enlever les parloirs. Tout le monde est malade mais ils veulent pas nous faire sortir.

Ils enlèvent les parloirs du bâtiment 1C ?

Ils veulent nous les enlever oui, mais nous on a dit non.

La clim, ça fait depuis une semaine qu’on leur dit « mettez-là nous ». En bas, ils ont la clim, en haut, ils ont la clim, nous, rien. Ça fait une semaine. Ils ont dit « vous avez jusqu’à mardi ». Oui mais mardi c’est loin. On va passer la journée d’hier, d’aujourd’hui, de demain… On leur a dit « donnez-nous au moins de l’eau fraîche ! ».

Et il y en a pas ?

Non, elle est tellement chaude qu’on peut pas la boire. Alors on a fait le compte, quatorze-quinze bouteilles, c’est une quantité. Mais dans la soirée, dans la nuit, je bois moi aussi, j’ai soif ! Eh beh on a pas d’eau. Ça veut dire démerdez-vous.

On a des cas de tuberculose. Ils nous ont dit qu’on est tous indemnes mais y en a qui sont malades, et on sait même pas ce qu’ils ont !

Hier, si on avait pas appelé les pompiers… Hier, on a appelé les pompiers, et les pompiers ils ont pas voulu venir. Ils ont dit « Ah non, si vous êtes en Centre de Rétention, appelez la police. ». Mais appelez-les-vous ! Parce que nous on les appelle et ils veulent pas nous répondre. Ils les ont appelés et ils sont montés. Après ils ont vu que c’était sérieux. Il y en a un qu’ils ont envoyé à l’hôpital, un qu’ils ont laissé. Et là, il est malade, il en peut plus. Il est allongé dans son lit, il est en train de trembler, il arrive pas à marcher. Il a même pas manger ce midi ! Il a des courbatures. Je sais pas quoi faire…Il a pas de goût… C’est le corona ! Il a mal de partout.

Vous savez s’il y a des médecins qui sont venus ?

C’est les pompiers. Quand on a appelé les pompiers, ils ont appelé le Centre de Rétention, ils leurs ont dit de monté. Ils sont montés, et ils ont constaté que c’était vrai. Il y en a un là allongé par terre et un autre là-bas. Ils ont contrôlé. Celui d’hier ils l’ont mis à l’hôpital, et celui de ce matin ils l’ont convoqué. On sait même pas si ils l’ont fait sortir, ils l’ont confiné ou… On sait rien. On attend. La tuberculose, le mec il est sorti, ils ont pas nettoyé la chambre. Ça fait que le mec qui est dans la chambre, on pense qu’il a attrapé sa maladie à lui. Après ils disent « Oui, mais on était occupés. On avait d’autres choses à faire. ».

Et la clim, ce matin on est sorti chercher des traitements, et eux ils ont la clim ! Et nous on a pas la clim. C’est un truc bizarre ça. On a dit « Comment ça vous avez la clim ? », « Nan mais c’est une clim à part… ». Mais s’il y a la clim, il y a la clim pour tout le monde ! Il fait tellement chaud qu’on sait même plus quoi faire.

C’est des menteurs. J’ai jamais vu une justice aussi menteuse qu’eux ! Là, il y a même pas de justice. C’est du mensonge sur mensonge sur mensonge… Ils acceptent le mensonge. C’est un truc de fou, j’ai jamais vu ça. On existe pas, ils calculent même pas un seul. C’est pas une injustice ça ?

Quand je vais sortir on va régler cette histoire, parce que mon histoire elle est vraiment à dormir debout, vraiment à dormir debout.

Il y a 4 mois en arrière j’étais en bas, on était bien, et là j’arrive : le corona, la tuberculose, la syphilis… Il a tellement de maladie qu’on sait même plus quoi. On se croirait dans l’ancien temps, le temps d’avant, de la peste, le choléra. Ils servent à rien, ils savent même pas quels symptômes on a, quelles maladies on a.

Qu’est-ce que j’ai fait pour être là ? J’ai fait ma peine, j’ai payé ma dette. Pourquoi je suis là ? Parce que j’ai refusé l’avion pour aller en Algérie ? Ça fait 50 ans que je suis en France.

Ici, chaque jour il y en a un qui tombe.

Témoignage de A :

Comme il t’a dit mon collègue, c’est la catastrophe là. Ils ont pas désinfecté la chambre, et chaque jour il y en a un qui tombe. Ils nous ont fait le test pour la tuberculose, et ils ont rien trouvé mais chaque jour, il y en a un qui tombe. Je sais pas, je comprends pas. Hier, il y en avait deux déjà.

Il n’y a pas de test positif c’est ça ?

C’est ça que je te dis oui. Après je sais pas, peut-être que ça sort pas directement sur le scanner ou sur le test qu’ils nous ont fait.

Et vous savez même pas si c’est le Covid ou la tuberculose ?

On sait même pas. Hier, on a testé la température, on a trouvé 40° ! Le pompier il a dit « il y a rien il y a rien ». Après le lendemain ils l’ont convoqué, ils ont pris ses affaires. Je sais pas il est où exactement. Même son numéro est éteint.

Vous êtes en contact avec les autres bâtiments ?

Oui on est en contact mais je pense qu’il y a rien. Il y a que dans notre bloc, le 1C.

Là on est confinés encore, on sait pas c’est quoi exactement. Mon collègue, il a un appel à la loi normalement à Aix, et là ils sont entrain de le juger par téléphone.

Quand tu dis « confinés » ça veut dire que les jugements sont à distance ?

Par téléphone oui.

C’est critique là la situation. C’est pas normal. Je suis inquiet un peu. Je vous ai raconté qu’est-ce qu’on vit. Vous imaginez même pas. On est dans une cage, vraiment une cage avec des grilles, des barbelés.

Soutien à tou.te.s les enfermées, à bas les CRA, liberté pour tou.te.s

Marseille anti-CRA
https://marseilleanticra.noblogs.org

On est en guerre : il y a des amis, des ennemis et on décide de ne pas soigner les blessés de cette guerre.

Les conditions sanitaires et hygiéniques du centre de rétention de Marseille sont insoutenables. A. Une personne enfermée décrit comme ça la situation :

“on est en guerre : il y a des amis, des ennemis et on décide de ne pas soigner les blessés de cette guerre”

Selon lui et selon d’autres témoignages, les personnes ne sont pas visitées par les médecins, et lorsqu’ils arrivent à obtenir une visite, aucune mesure n’est prise pour les traiter correctement.

A. nous raconte que lorsqu’il a finalement réussi à obtenir une visite, le médecin lui a dit « ça se voit que t’es pas malade », sans même l’ausculter. « Comme s’il avait un scanner dans les yeux » ajoute A.

Dans le bâtiment 1C où est enfermée une personne très malade, des protestations ont eclaté cette semaine et ce n’est qu’après une menace d’incendie que les keufs ​​révèlent que cette personne est atteinte de tuberculose. La seule mesure qui a été prise jusqu’à présent est un isolement de 3 jours pour l’ensemble du batiment. 

Tout cela ajoute à la surpopulation et à la chaleur insupportable. S. dit qu’il est impossible de dormir, il n’y a pas de ventilation. S. ajoute que les keufs les traitent « pire que des animaux ».

Soutien à tou.te.s les enfermées, à bas les CRA, liberté pour tou.te.s

Marseille anti-CRA